Le rapport 2024 de l'indice Ibrahim de la gouvernance en Afrique
(IIAG) met en lumière une détérioration notable de la gouvernance publique sur
le continent africain au cours des dix dernières années. Ce document, publié le
23 octobre 2024, révèle que plus de 77 % de la population africaine vit
désormais dans des pays où la sécurité et la démocratie, deux dimensions
cruciales de la bonne gouvernance, se sont détériorées entre 2014 et 2023.
Méthodologie et Catégories de l'Indice
L'IIAG, en place depuis 2007, évalue la gouvernance publique de 54 pays africains tous les deux ans à travers quatre grandes catégories : la sécurité et l'État de droit, la participation et les droits humains, le développement économique durable, et le développement humain. Chaque catégorie est divisée en sous-catégories, et le rapport 2024 a pris en compte 96 indicateurs pour mesurer les performances globales des pays.
Les sources des données sont variées, comprenant des statistiques nationales, des institutions internationales, des ONG, ainsi que des sondages d'opinion pour recueillir la perception des citoyens. Ces données permettent de dresser un tableau complet de la gouvernance sur le continent, et chaque pays reçoit une note entre 1 et 100, établissant un classement basé sur l’évolution au fil des ans.
Stagnation et Détérioration de la Gouvernance
Les résultats du rapport montrent une stagnation, voire une dégradation de la gouvernance en Afrique. Après quatre années de progrès limités, les indicateurs de la gouvernance globale ont commencé à se détériorer à partir de 2022, en grande partie en raison de la montée des conflits et du recul de l'État de droit. La démocratie a également souffert d’un rétrécissement de l'espace participatif, avec une perte de 1,6 point depuis 2014.
Certains pays comme le Botswana, la Namibie, et même l'île Maurice, traditionnellement bien classés, ont vu leur situation se dégrader sur cette période. En particulier, 21 pays, représentant près de 48 % de la population africaine, affichent en 2023 un niveau de gouvernance inférieur à celui de 2014.
Perception Citoyenne : Insatisfaction Croissante
Un autre aspect important mis en avant par le rapport est le décalage entre les progrès observés dans certains domaines et la perception des citoyens. Bien que des avancées soient notées dans le développement humain et les opportunités économiques, les citoyens africains sont de plus en plus critiques envers leurs dirigeants. Les indicateurs relatifs à la sécurité, la protection sociale et les opportunités économiques montrent des baisses significatives de satisfaction, malgré certaines améliorations objectives.
Progrès Notables dans Certains Domaines
Malgré cette tendance générale à la dégradation, le rapport souligne des progrès dans certaines catégories, notamment en matière d'infrastructure et d'égalité hommes-femmes. Les Seychelles, par exemple, occupent la première place du classement 2024 grâce à des progrès importants dans divers domaines. Par ailleurs, des pays comme l'Égypte, le Malawi, le Maroc, et la Côte d'Ivoire continuent d'afficher une amélioration de leur gouvernance globale, démontrant que des progrès restent possibles malgré les défis actuels.
Une Gouvernance en Mutation
L'indice Ibrahim de la gouvernance en Afrique 2024 offre un panorama contrasté. Si certains pays continuent de progresser, la majorité du continent fait face à une crise de gouvernance marquée par l'insécurité et un rétrécissement des libertés démocratiques. Pour Mo Ibrahim, fondateur de la Fondation Mo-Ibrahim, il est crucial de ne pas réduire l'Afrique à une simple moyenne, mais plutôt de reconnaître la diversité des trajectoires de ses 54 États.