Depuis l’avènement de la junte militaire dirigée par Mamadi Doumbouya, l’ancien légionnaire français et chef du groupement des Forces spéciales de la Guinée, nous assistons à une radicalisation du régime caractérisée par des expropriations, des arrestations arbitraires et des disparitions forcées de leaders de certains partis politiques et de membres de la société civile. Dernière manifestation de la folie liberticide de ce régime, c’est l’arrestation le 26 décembre 2024 du jeune leader Aliou Bah du parti MoDel à la frontière alors qu’il se rendait en Sierra Leone et inculpé pour « offense et diffamation » du Chef de l’Etat.
Ce comportement de la Junte militaire au pouvoir montre que la Guinée fait face à un régime totalitaire. Les chefs de la junte ont décidé de se maintenir au pouvoir malgré leur promesse de ne pas être candidats aux élections qu’ils projetaient d’organiser pour installer un gouvernement civil dirigé par un président élu.
La stratégie utilisée pour confisquer le pouvoir est d’étouffer toute forme d’opposition. Pour la mettre en pratique, la Junte a entrepris les actions suivantes :
- Le musèlement de la presse avec le retrait des licences et la fermeture, le 22 Mai 2024, des trois principales chaînes de télévision et de radio privées que sont Espace, Djoma et FIM suivi de la saisie de leur matériel de travail.
- L’expropriation des résidences privées des leaders des deux grands partis politiques Sydia Touré de l’UFR et Cellou Dalein Diallo de l’UFDG suivie de leur exil forcé.
- L’arrestation et la mort en détention de deux officiers supérieurs, le général Sadiba Coulibaly, ancien chef d’état major général des Forces armées et numéro deux de la Junte, et le colonel Pépé Célestin Kilivoqui.
- L’arrestation et la disparition forcée, le 9 juillet 2024, des leaders du FNDC (Front national de défense de la Constitution), Oumar Sylla alias Foniké Mengué et Billo Bah.
- La mort en détention, le 26 juillet 2024, du Dr Mohamed Dioubaté, pédiatre, à la prison civile de Kankan, accusé d’avoir brûlé l’effigie du chef de la Junte Mamadi Doumbouya.
- L’enlèvement et la disparition dans le centre-ville de Conakry, le 17 octobre 2024, de Sadou Nimaga, secrétaire général du ministère des Mines et de la Géologie.
- L’arrestation par des hommes en uniforme militaire et la disparition, le 4 décembre 2024, du journaliste et critique de la junte Habib Marouane Camara.
- L’arrestation, le 26 décembre 2024, du jeune leader du parti MoDel Aliou Bah et sa traduction en justice sous des accusations fallacieuses d’offense au chef de l’Etat.
Pottal Fii Bhantal Fouta-Djallon exhorte la Junte militaire à revenir à la raison et à mettre fin à cette violence politique. Elle doit immédiatement libérer tous les détenus politiques, cesser toute forme de menaces et d’intimidations contre les membres de la société civile et des partis politiques et autoriser les activités des organes de presse privés. Elle doit respecter les termes de la transition qu’elle a elle-même fixés au 31 décembre 2024 de commun accord avec la Cédéao et retourner dans les casernes militaires.
Nous disons à la Junte au pouvoir que la violence politique ne paie pas et qu’elle se retourne toujours contre ses auteurs. Pour mémoire :
- Une semaine après la mort du premier dictateur guinéen Sékou Touré, des militaires proches de son cercle dirigés par Lansana Conté et Diarra Traoré ont orchestré un coup d’Etat le 3 avril 1984. Ils ont mis aux arrêts les membres de la famille du défunt président et les caciques du régime. Un an après, la plupart d’entre eux furent victimes d’exécutions extra-judiciaires comme cela se faisait sous le régime dictatorial de Sékou Touré.
- Après la mort du président Lansana Conté, un autre groupe de militaires issus de l’entourage du président dirigés par Dadis Camara, ont mené un autre coup d’Etat, le 23 décembre 2008. Ils ont mis aux arrêts ses deux fils aînés et plusieurs officiers militaires de son ethnie.
- Dadis Camara à son tour a été évincé du pouvoir après une tentative d’assassinat par son aide de camp, le 3 décembre 2009, et remplacé par le numéro 3 du régime et ministre de la Défense Sékouba Konaté. Aujourd’hui Dadis Camara et ses proches sont en prison pour les crimes contre l’humanité qu’ils ont commis le jour fatidique du 28 Septembre 2009.
- Sékouba Konaté à son tour fut remplacé par Alpha Condé à la suite des élections truquées de 2010. Aujourd’hui Sékouba Konaté vit en exil forcé en France.
- Alpha Condé, après avoir gouverné pendant dix ans comme un vrai despote et causé la mort de centaines de Guinéens, a orchestré un coup d’Etat constitutionnel pour s’octroyer un troisième mandat en violation de la Constitution du pays. Il fut évincé par un nouveau coup d’Etat, le 5 septembre 2021, dirigé par le colonel Mamadi Doumbouya ancien militaire de la légion étrangère française et chef du groupement des Forces spéciales créé par Alpha Condé. Aujourd’hui ce dernier vit en exil forcé en Turquie et beaucoup d’anciens membres influents de son régime croupissent en prison, accusés de corruption et de détournement de fonds publics.
La Junte guinéenne doit tirer les leçons de ce passé violent de la Guinée pour sortir le pays de ce cercle vicieux de régimes totalitaires et de coups d’Etat.
L’avènement d’un Etat de droit, la tenue d’élections libres, transparentes et inclusives, ainsi que la lutte pour le respect des droits de l’homme et contre l’impunité doivent être intégrés dans programme des partis politiques et des organisations de la société civile comme le FNDC.
Le régime dictatorial d’Alpha Condé a montré que les élections seules ne garantissent pas l’Etat de droit. C’est pourquoi, la Constitution doit prévoir une clause de sauvegarde permettant de poursuivre pour crime de haute trahison tout chef de la magistrature suprême qui violerait les libertés publiques fondamentales.
La Commission Centrale de Pottal Fii Bhantal Fouta-Djallon