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Bassirou Diomaye Faye a aussi annoncé dans un entretien que son homologue français Emmanuel Macron avait reconnu dans une lettre que les forces coloniales françaises avaient commis un «massacre» à Thiaroye, en 1944.
Le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a indiqué jeudi dans un entretien avec l’AFP que la France allait devoir fermer ses bases militaires au Sénégal, dont la présence est incompatible selon lui avec la souveraineté de son pays. «Le Sénégal est un pays indépendant, c’est un pays souverain et la souveraineté ne s’accommode pas de la présence de bases militaires dans un pays souverain», a dit Bassirou Diomaye Faye dans cet entretien au palais présidentiel.
Bassirou Diomaye Faye, élu en mars sur la promesse de rétablir la souveraineté de son pays, a assuré qu’il ne s’agissait pas d’un acte de «rupture», et a défendu un «partenariat rénové» avec l’ancienne puissance coloniale et alliée historique française. Il a salué comme un «grand pas» le fait que le président français Emmanuel Macron ait reconnu dans une lettre que les forces coloniales françaises avaient commis un «massacre» à Thiaroye, près de Dakar, le 1er décembre 1944 en ouvrant le feu contre des Tirailleurs sénégalais rentrés de France.
Bassirou Diomaye Faye a révélé au cours de l’entretien l’envoi de cette lettre, confirmé par l’Élysée, trois jours avant des commémorations auxquelles les nouvelles autorités sénégalaises entendent donner un relief particulier. «Un partenariat rénové (…) ne peut être rénové que dans la vérité et dans l’exhaustivité de la vérité», a dit Bassirou Diomaye Faye en faisant référence aux nombreuses zones d’ombre qui subsistent sur ce que l’ancien président François Hollande avait qualifié en 2014 de «répression sanglante», mais pas de «massacre».
Bassirou Diomaye Faye a réaffirmé sa volonté de diversifier les partenaires de son pays, qui cherche à se développer et à rester l’interlocuteur du plus grand nombre alors que des pays du Sahel voisin passés sous le gouvernement de militaires ont abruptement rompu avec la France et se sont tournés vers la Russie. «La France reste un partenaire important pour le Sénégal au regard du niveau d’investissements, de la présence de sociétés françaises et même de citoyens français qui sont au Sénégal», a dit Bassirou Diomaye Faye.
Contre-exemple chinois
Mais, 64 ans après l’indépendance, «les autorités françaises doivent envisager d’avoir un partenariat dépouillé de cette présence militaire-là, mais qui soit un partenariat riche, un partenariat fécond, un partenariat privilégié et global comme nous l’avons avec beaucoup d’autres pays», a-t-il dit. «Présence militaire ou absence militaire ne doit pas être égal à rupture», a-t-il dit. Il a invoqué l’existence de relations entre le Sénégal et des pays comme la Chine, la Turquie, les États-Unis ou l’Arabie saoudite. «Tous ces pays-là n’ont pas de base militaire au Sénégal», a-t-il dit.
«Aujourd’hui, la Chine est notre premier partenaire commercial par le volume des investissements et des échanges. Est-ce que la Chine a une présence militaire au Sénégal ? Non. Est-ce que pour autant, on parle de rupture ? Non», a-t-il dit. Bassirou Diomaye Faye a évoqué une mise à jour prochaine de la doctrine de la coopération militaire. Cette actualisation «impose évidemment qu’il n’y ait plus de bases militaires de quelque pays que ce soit au Sénégal, mais elle impose aussi d’autres évolutions dans la coopération militaire avec ces différents pays qui entendent encore la maintenir (la coopération) avec le Sénégal», a-t-il dit.
La France a décidé de réduire fortement sa présence militaire en Afrique. Au début de l’été, deux sources proches de l’exécutif français et une source militaire avaient confié à l’AFP que l’intention était de conserver une centaine de militaires au Gabon (contre 350 alors), autant au Sénégal (contre 350) et en Côte d’Ivoire (600 auparavant) ainsi que quelque 300 au Tchad (contre 1000). L’Élysée a annoncé cette semaine que l’envoyé personnel d’Emmanuel Macron en Afrique, Jean-Marie Bockel, avait remis au président français son rapport sur la reconfiguration du dispositif militaire en Afrique, qui prône un partenariat «renouvelé» et «coconstruit».
AFP