Au terme de plus de 10 mois de cavale, le Colonel Claude Pivi que ses laudateurs appellent affectueusement Coplan ou Grand Co, a été appréhendé le mardi 17 septembre, à la frontière guinéo-libérienne par la Police de Monrovia. Il a été conduit le lendemain en Guinée où il a été écroué à la maison d’arrêt flambant-neuf de Coyah, agglomération située à 50 kilomètres à l’est de Conakry. Il paraît que là les conditions carcérales, sécuritaires et sanitaires y sont idoines au regard de son état de santé et de son statut d’officier supérieur de l’armée.
C’est lors des crises sociopolitiques qui agitent le crépuscule de l’ère du Général Conté et du PUP en 2007-2008, que le grand public découvre l’Adjudant-chef Claude Pivi, alias Coplan. L’homme est grand et massif. Des muscles, il en a et en impose. Mais il est surtout exubérant, haut en couleur. Il n’abhorrait guère de porter son treillis tout en coiffant, en lieu et place du béret rouge, un couvre-chef couvert de fétiches et de cauris comparable à celui des féticheurs. Corpulence impressionnante, tenue vestimentaire extravagante et légende des hauts faits de guerre en Sierra-Leone ont contribué à construire, dans l’imaginaire collectif, une représentation mystique du personnage Coplan. On le dit invulnérable aux balles, capable d’épouser la forme animale pour échapper aux dangers et à ses adversaires. Dans l’ambiance sociopolitique délétère qui clôt l’ère Conté, Pivi profite largement de son aura. Il règne en maître sur toute la banlieue où il contribue au maintien de l’ordre et surtout de la sécurité. Dans les quartiers infestés de malfrats et de délinquants de tout acabit, il organise des patrouilles craintes particulièrement des narcotrafiquants qui ont fait de la Guinée l’une de leurs plaques tournantes en Afrique de l’Ouest.
Après avoir activement participé à la prise du pouvoir par le CNDD, il exige un poste et devient membre du gouvernement. Il veut un poste ? On lui donne un titre. Il hérite du ministère chargé de la Sécurité présidentielle, sans locaux, ni personnel, ni équipement adéquat. Peut-être aussi sans véritable budget. Ce qui lui a valu d’être moqué par les avocats (sans vinaigrette) de la partie civile, durant le procès du massacre du 28 septembre 2009. C’est par l’exercice des fonctions de ce ministère fantôme que sont advenus les faits qui lui sont reprochés dans le procès : voies de faits, menaces contre les commerçants, pillages de boutiques, etc. Comme tous ses coaccusés du procès du massacre du 28 septembre 2009, le colonel Pivi plaidait non coupable avant de prendre la clé des champs.
Il nie sa présence au Stade du 28 septembre, le jour des évènements. Il était, dit-il, en mission présidentielle à Coyah. Comme l’homme n’a pas le don d’ubiquité, il ne pouvait être au même moment à 50 km de Conakry et au Stade du 28 septembre. Sauf à recourir aux génies protecteurs de la Forêt sacrée !
Mal lui en prit de s’échapper de force de l’Hôtel cinq étoiles de Coronthie. Dame Thémis l’a lourdement condamné par contumace à la réclusion criminelle à perpétuitié, avec 25 ans de sûreté. C’est la peine la plus lourde. Avec le principe de la responsabilité du chef, il aurait sans doute écopé de la même peine que Moussa Dadis Camara et Moussa Thiegboro Camara.
Abraham Kayoko Doré