En Guinée, le vendredi revêt une importance particulière, surtout pour les femmes. Ce jour, en lieu et place des vêtements sexy, c’est le textile guinéen ou d’autres vêtements sobres qui sont mis en valeur dans les rues, dans les services, dans les universités. Cette spécificité qui mêle tradition, spiritualité et expression de soi s’est installée de plus en plus dans les comportements. Comment ce comportement vestimentaire est perçu dans la société ? Pourquoi les femmes et les hommes adoptent-ils ce style vestimentaire ? C’est sur toutes ces questions que notre rédaction a rencontré plusieurs acteurs, notamment les femmes, un sociologue et un religieux.
Le vendredi est un jour où les liens se resserrent. C’est l’occasion de partager des moments précieux autour de divers évènements, notamment la prière dans les mosquées. Les femmes, élégantes dans leurs pagnes colorées, apportent une touche de joie et de vivacité à ces rassemblements.
Diaraye Cissé, étudiante à l’ISIC de Kountia, explique son choix vestimentaire en pagne africain les vendredis, « Pendant tous les autres jours de la semaine, moi, je porte des pantalons ou des chemises. Mais le vendredi, c’est notre jour à nous ! On aime se faire belle, porter des tenues traditionnelles ou des tenues modernes, mais toujours avec une touche d’élégance. C’est un moment pour se sentir bien dans sa peau et affirmer sa féminité autrement », explique-t-elle
Bien qu’elle soit chrétienne, Élisabeth Sano confirme qu’elle adopte elle aussi ce comportement vestimentaire les vendredis. Elle explique ses motivations. « Moi, je suis chrétienne, mais je suis aussi Guinéenne. Je suis fière de mes racines et je m’efforce de concilier ma foi avec les coutumes de mon pays. Et les vendredis, je porte souvent des vêtements traditionnels tout en allant à l’église. Je pense que l’on peut être moderne et traditionnel à la fois. Et la meilleure façon de vivre ensemble est l’acceptation des valeurs et des croyances des autres », a-t-elle précisé.
Fodé Kaké, est sociologue de formation. Depuis quelque temps, il observe de près cette situation chez les femmes. Pour lui, cela dénote principalement du caractère que revêt le vendredi. Et se répercute sur le comportement vestimentaire des hommes et des femmes.
« Le vendredi est un jour symbolique en Guinée, marqué par la prière du vendredi. Mais il est aussi porteur de significations sociales et culturelles profondes. Les vêtements jouent un rôle essentiel dans cette expression identitaire. Ils permettent aux femmes de se démarquer, d’affirmer leur appartenance à un groupe social et de célébrer leur féminité », a-t-il spécifié.
Il poursuit en soulignant que cette pratique est ancrée dans l’histoire et les traditions de la société guinéenne. « Les vêtements traditionnels, par exemple, sont habituellement associés à des événements importants de la vie, comme les mariages ou les fêtes religieuses. Le vendredi, en portant ces tenues, les femmes renouent avec leurs racines et renforcent leur sentiment d’appartenance », dit-il.
Du point de vue religieux, le vendredi est un jour sacré en islam. « Le vendredi en islam est un grand jour. Il est compté parmi les grandes fêtes. À savoir la fête du ramadan et la Tabaski, mais le vendredi s’ajoute à ce compte pour faire trois », précise l’imam Alhassane Sidibé avant d’ajouter : « Tout doit changer le vendredi, de l’alimentation à l’habillement. Ça veut dire que si tu manges du riz tous les jours, le vendredi, il faut changer en prenant de la salade par exemple, du spaghetti, en gros tout ce dont on n’a pas l’habitude ».
Pour ce qui est du mode vestimentaire, l’imam Alhassane Sidibé révèle : « Le vendredi est un jour béni dans l’islam. C’est le jour de la grande prière, un moment de recueillement et de communion avec Dieu. Les femmes, en se parant de leurs plus beaux atours, expriment leur dévotion et leur respect pour cette journée particulière. Il est donc recommandé de bien se parfumer, ce, pour les hommes et les femmes ».
Cependant, il précise que « l’islam n’impose pas de code vestimentaire particulier pour les femmes, à l’exception du hijab qui est recommandé. C’est donc une question de choix personnel et de culture », affirme-t-il.
Au-delà de l’apparence, si le vendredi est synonyme d’élégance et de beauté pour les femmes guinéennes, il revêt également une dimension sociale et communautaire. Les vêtements deviennent alors un moyen de communication non verbale, un langage qui permet d’affirmer son identité.
JRI de l’Ombre