Poursuivie par Mohamed Bangoura pour des faits présumés d’ «abus de confiance et escroquerie », la compagnie Air Sénégal, représentée par Mouhamadou Moustapha M’Baye, son délégué en Guinée, a comparu ce mercredi 20 novembre 2024 devant le tribunal correctionnel de Kaloum.
À la barre, Mouhamadou Moustapha M’Baye a nié les accusations portées contre lui et livré sa version des faits en réponse aux questions du juge.
« Je ne reconnais pas les faits, monsieur le juge. Je m’explique : au mois de mai, monsieur Bangoura est venu acheter des billets aller-retour Conakry-New York avec escale à Dakar, pour lui et sa femme. Leur vol, initialement prévu le 25 juillet de Dakar vers New York, a été annulé, et ils ont finalement voyagé le 28 juillet. Ensuite, le 19 septembre 2024, la ligne New York-Dakar a été supprimée. Nous avons contacté tous les passagers via le mail et le numéro fournis par monsieur Bangoura pour leur proposer soit un remboursement partiel, soit un réacheminement via Royal Air Maroc. Il a opté pour le remboursement mais ne savait pas quand il allait rentrer. Le montant convenu était de 591 dollars. Nous sommes prêts à rembourser cette somme à tout moment. Cependant, il affirme avoir subi un préjudice lié à cette annulation. »
Le représentant d’Air Sénégal a également précisé que les retards et annulations de vols ne concernaient pas uniquement les États-Unis et a exprimé les regrets de la compagnie pour les désagréments causés.
De son côté, le plaignant Mohamed Bangoura, administrateur civil, a livré une version contraire, accusant Air Sénégal ‘’d’escroquerie et d’un défaut’’ de communication préjudiciable : « monsieur le juge, j’ai acheté deux billets en mai 2024 à 494 dollars l’unité. Après l’achat, ma femme m’a demandé de modifier les dates. J’ai payé les frais supplémentaires exigés. Nous sommes partis, mais dès le début, des retards ont perturbé le voyage. À l’aller, nous avons passé cinq jours bloqués à Dakar avant d’arriver à New York. Mon retour était prévu pour le 20 septembre, mais la compagnie ne m’a informé de l’annulation que le 17 septembre, en me proposant d’acheter un autre billet à mes frais pour rentrer à Conakry. Finalement, j’ai dû me débrouiller seul pour revenir. Cela m’a causé d’importantes pertes financières et professionnelles. Je demande un dédommagement. »
Après l’interrogatoire, les plaidoiries ont été ouvertes. L’avocat de Mohamed Bangoura a réclamé des réparations à hauteur de 500 millions de francs guinéens pour les préjudices subis :
« La compagnie a failli à son obligation de transporter mon client d’un point A à un point B. Cela relève d’une escroquerie caractérisée. Si sa femme avait subi un préjudice grave à cause du retard, nous en serions à une toute autre affaire. Nous demandons réparation. »
De son côté, le ministère public a estimé que les faits reprochés ne constituaient pas un délit au sens de la loi pénale et a requis un non-lieu : « votre honneur, il s’agit ici de déterminer si les faits constituent une infraction pénale. Nous estimons qu’ils ne le sont pas et demandons de ne pas retenir le prévenu dans les liens de la culpabilité. »
L’avocat d’Air Sénégal a, quant à lui, plaidé pour que la partie civile soit déboutée, affirmant que cette affaire relevait du tribunal civil, et non correctionnel. Il a également sollicité 500 millions de francs guinéens en dédommagement pour le préjudice moral subi par la compagnie en raison de la médiatisation de l’affaire :
« Cette affaire n’aurait jamais dû être portée devant un tribunal correctionnel. Nous demandons que la partie civile soit déboutée et condamnée à payer des dommages-intérêts pour la réputation entachée d’Air Sénégal. »
Après les débats, le tribunal a décidé de renvoyer l’affaire au 27 novembre 2024 pour délibération.