Améliorer les conditions de vie des populations africaines face aux changements climatiques

4 months ago
LES CHIMPANZÉS DE BOSSOU -GUINEE

La COP 27 qui s’est ouverte le 6 novembre à Charm el-Cheikh en Égypte se poursuit jusqu’au 18 novembre. Wathi a organisé le 20 octobre dernier en collaboration avec le Club du Sahel et de l'Afrique de l'Ouest un dialogue avec le scientifique malien Youba Sokona, vice-président depuis 2015 du Groupe Intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC). Deux heures de conversation pour décrypter ce que signifie le changement climatique pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel en particulier.

On a beaucoup parlé de l’Afrique de l’Ouest mais les enjeux sont très proches de ceux des autres régions du continent, très exposées aussi aux effets multiples du réchauffement de la planète. Le professeur Youba Sokona est un expert dans les domaines de l'énergie et du développement durable en Afrique, il a dirigé entre autres le Centre africain pour la politique en matière de climat et l’Observatoire du Sahara et du Sahel. 

Il a très clairement expliqué les effets du réchauffement de la planète pour la région ouest-africaine, pays du Sahel comme pays côtiers, des effets que je pourrais résumer, en partie seulement, par les mots suivants : irrégularité, imprévisibilité, sécheresses, inondations, érosion côtière, dégradation des conditions agricoles et pastorales, températures extrêmes… On oublie parfois que la hausse des températures dans une partie du monde où il fait déjà très chaud rendra la vie au quotidien très difficile, sans même parler des effets sur la fréquence des catastrophes et les activités économiques. Le professeur Sokona a rappelé que l’augmentation de la température de surface est plus rapide en Afrique que la moyenne mondiale. 

Le message le plus important, dites-vous, c’est celui de la nécessité d’un narratif africain qui place l’amélioration des conditions de vie des populations au cœur des stratégies et des politiques d’adaptation au changement climatique 

En effet. Il s’agit de contextualiser le narratif international sur l’atténuation et l’adaptation en partant des réalités actuelles des pays ouest-africains, qui sont celle d’un niveau très faible d’accès des populations à l’énergie, celle de la déforestation accélérée, le bois et le charbon de bois étant de loin la source d’énergie domestique au quotidien, celle d’économies peu industrialisées. C’est celle d’une dégradation des écosystèmes et d’une urbanisation qui ne s’accompagne pas de transformation des modes de transport et d’infrastructures adaptées à la contrainte climatique. 

La conversation sur le changement climatique avec Youba Sokona nous a amenés à discuter de développement durable dans ses différentes déclinaisons, du gâchis que fut la négligence du développement rural, de l’absence de valorisation à grande échelle des ressources naturelles comme de nombreux fruits des différents terroirs sahéliens quasiment méconnus des nouvelles générations, du sous-investissement dans la recherche de solutions adaptées et aussi des échanges qui restent limités et circonstanciels entre les décideurs politiques africains, les acteurs économiques et les scientifiques.

Pour le professeur Sokona, l’enjeu est de transformer en profondeur tous les aspects de la société avec quatre transitions essentielles…

Oui, des transitions indispensables dans les domaines de l'énergie, de l’utilisation des terres, des infrastructures et de l'industrie. La réponse à la menace existentielle que constituent les changements climatiques, c’est d’une part l’exigence pour tous de la réduction maximale des émissions des gaz à effet de serre, d’autre part l’impératif d’innovations dans notre partie du monde pour que nous ne laissions pas aux prochaines générations une région dont de vastes parties seront devenues hostiles à la vie. 

Évidemment, il y a une injustice abyssale dans le fait pour les pays africains et pour d’autres pays non africains notamment insulaires qui risquent la disparition pure et simple paient le prix le plus élevé du dérèglement climatique provoqué largement par les grandes puissances économiques de la planète. Mais cela ne change rien à la responsabilité des décideurs africains et des populations, de nous tous, de contribuer à limiter les dégâts et de faire de l’intégration de la contrainte climatique une occasion, une de plus, de donner un nouveau contenu à la notion de progrès collectif.

Rfi
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